22nd April 2025

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En pleine phase d’examens. J’ai très mal au ventre. Mais pas à la tête. Quelques minutes de prise de recul, je médite des maximes épicuriennes, et tout stress mental est évacué. Mon copain m’accompagne. Mon ange m’accompagne. Il m’a dit qu’il y a quelques années, il s’était bourré la gueule avec son meilleur ami la veille d’un examen – il n’y avait aucun enjeu à le réussir. Je n’ai pas d’intérêt particulier à réussir mes examens, moi non plus. J’ai un intérêt à les rater, en réalité.
L’enjeu : un CV sans taches ? Mon futur métier requiert le passage d’un concours. Alors, quel est le problème ? Me retrouver démunie face à une feuille vide. Personne pour me donner une seule once de reconnaissance. Tu n’as rien écrit, donc tu ne sais pas écrire, tu n’as rien appris, tu ne mérites pas de faire des études, tu es conne. La première chose que les gens me disent pour me consoler lorsque je leur fais part de ce manque de confiance ou d’estime de soi, c’est que je me trompe sur mon jugement : « non, non, tu es intelligente ». Mauvaise réponse. Dites-moi : « tu es conne, et donc ? ». Rappel : le seul ordre qui vaille, l’ordre axiologique, l’ordre moral. Un cerveau plein et un cœur vide, ça ne sert à rien. Je veux que mon cœur prenne toute la place.
Une feuille blanche. Oui, c’est un bout de papier qui me donne la diarrhée depuis une semaine. Conséquence directe de la sagesse épicurienne : la plupart de nos problèmes sont des constructions de l’esprit (la mort, les dieux, etc.). La feuille n’est rien d’autre qu’une feuille. Elle n’est pas la preuve que je suis incapable ou inutile. Peu importe ce que je fais ou non de cette feuille, ça ne m’empêchera pas de dormir, de manger, de boire ou d’aimer. Donc, c’est un faux problème.
Mon ventre me fait mal. Il me reste une semaine avant l’épreuve fatidique – la seule que je ne saurais réussir (sans me tuer au travail). Mon corps le sait bien. Je me demande ce qu’il faut pour que le corps suive l’esprit. Peut-être qu’il n’y a dans le corps que ce que l’esprit cache dans l’inconscient. Que de choses malsaines j’ai incorporées. Alors, que vais-je choisir ? C’est un choix. J’ai un certain degré de liberté. Je dois choisir entre : zone de confort et détachement de mon égo. M’accrocher à un idéal destructeur – mais commode – ; ou bien renoncer.
Rappel : il n’y a aucun enjeu à réussir. D’autre part, si je rate l’examen, j’aurai prouvé par la pratique que ça n’a pas d’importance. J’ai toujours cru que la seule façon de se libérer, c’est d’agir, et plus précisément, de s’exercer (et de répéter les exercices jusqu’à les réussir). Rosa Luxemburg : « Celui qui ne bouge pas ne sent pas ses chaines. » Bouger. Parler ne sert à rien, il faut bouger. Ça ne sert à rien de se répéter qu’une feuille blanche n’a aucune importance. Cette vérité ne peut s’intégrer que par l’expérience : il faut expérimenter, rendre une feuille blanche et observer sans projeter. Je rends la feuille blanche. Le soleil continue de se lever, la nourriture n’a pas disparu de mon frigo, je me réveille toujours aux côtés de mon amoureux. Ce n’est que de cette sorte qu’on acquiert une forme de sagesse. La plupart des vérités existentielles sont expérimentales. Et il n’y a pas de petit progrès en la matière. Je m’en veux d’écrire (pour la deuxième fois) sur le stress des examens. Mais je m’en veux encore plus d’être aussi sévère à mon propre égard, comme si c’était de mon plein gré que j’ai fait des études une source énorme de souffrance. Humilité et douceur : assumer que l’on part de loin, assumer que ça peut prendre beaucoup de temps, ne pas se torturer à cause de ça.
In the middle of exams. My stomach hurts badly. But not my head. A few minutes of detachment, critical distance and meditation on Epicurean maxims, and all mental stress is evacuated. My boyfriend is with me. My angel is with me. He told me that a few years ago, he got drunk with his best friend the night before an exam — there was no point in passing it. I have no particular interest in passing my exams either. I have an interest in failing them, actually.
What’s at stake? A spotless curriculum vitae? My future career only requires passing an exam (that has nothing to do with my current studies). So, what's the problem? Finding myself helpless in front of a blank sheet of paper. No one to give me a single ounce of recognition. You haven't written anything, so you don't know how to write, you haven't learned anything, so you don't deserve to study, you're stupid. The first thing people tell me to console me when I share this lack of confidence or self-esteem is that I'm mistaken in my judgment: "No, no, you're intelligent." Wrong answer. Tell me: "You're stupid, so what?" Reminder: the only order that counts is the axiological order, the moral order. A full brain and an empty heart are useless. I want my heart to take up all the space.
A blank sheet of paper. Yes, it's a piece of paper that's been giving me diarrhea for a week. A direct consequence of Epicurean wisdom: most of our problems are constructs of the mind (death, gods, etc.). The sheet of paper is just that: a sheet of paper. It's not proof that I'm useless. No matter what I do or don't do with this sheet of paper, it won't stop me from sleeping, eating, drinking, or loving. So, it's a false problem. My stomach hurts. I have one week left before the fateful exam—the only one I can't pass (without killing myself with work). And my body knows this well. I wonder what it takes for the body to follow the mind. Perhaps the body only embodies what the mind hides in the unconscious. And God knows how many unhealthy things I've taken into my body. So, what will I choose? It's a choice. I have a certain degree of freedom. I must choose between: comfort zone and detachment from my ego. Clinging to a destructive — but convenient— ideal; or giving up.
Reminder: there's no point in passing. On the other hand, if I fail the exam, I will have proven through practice that it doesn't matter. I've always believed that the only way to free yourself is to act, and more precisely, to practice (and repeat the exercises until you succeed). Rosa Luxemburg: "Those who do not move, do not notice their chains." Move. Talking is useless, you have to move. It is useless to repeat to yourself that a blank sheet of paper has no importance. This truth can only be assimilated through experience: you have to experiment, give up a blank sheet of paper, and observe what happens without projecting. I give up the blank sheet of paper. The sun continues to rise, the food has not disappeared from my fridge, I still wake up next to my lover. Only in this way can one acquire a form of wisdom. Most existential truths are experiential. And there is no small progress in this matter. I blame myself for writing (for the nth time) about exam stress. But I blame myself even more for being so harsh on myself, as if it were of my own free will that I made studying an enormous source of suffering. Humility and gentleness: accept that you are starting from a long way back, accept that it can take a long time, and don't torture yourself because of it.

L’enjeu : un CV sans taches ? Mon futur métier requiert le passage d’un concours. Alors, quel est le problème ? Me retrouver démunie face à une feuille vide. Personne pour me donner une seule once de reconnaissance. Tu n’as rien écrit, donc tu ne sais pas écrire, tu n’as rien appris, tu ne mérites pas de faire des études, tu es conne. La première chose que les gens me disent pour me consoler lorsque je leur fais part de ce manque de confiance ou d’estime de soi, c’est que je me trompe sur mon jugement : « non, non, tu es intelligente ». Mauvaise réponse. Dites-moi : « tu es conne, et donc ? ». Rappel : le seul ordre qui vaille, l’ordre axiologique, l’ordre moral. Un cerveau plein et un cœur vide, ça ne sert à rien. Je veux que mon cœur prenne toute la place.
Une feuille blanche. Oui, c’est un bout de papier qui me donne la diarrhée depuis une semaine. Conséquence directe de la sagesse épicurienne : la plupart de nos problèmes sont des constructions de l’esprit (la mort, les dieux, etc.). La feuille n’est rien d’autre qu’une feuille. Elle n’est pas la preuve que je suis incapable ou inutile. Peu importe ce que je fais ou non de cette feuille, ça ne m’empêchera pas de dormir, de manger, de boire ou d’aimer. Donc, c’est un faux problème.
Mon ventre me fait mal. Il me reste une semaine avant l’épreuve fatidique – la seule que je ne saurais réussir (sans me tuer au travail). Mon corps le sait bien. Je me demande ce qu’il faut pour que le corps suive l’esprit. Peut-être qu’il n’y a dans le corps que ce que l’esprit cache dans l’inconscient. Que de choses malsaines j’ai incorporées. Alors, que vais-je choisir ? C’est un choix. J’ai un certain degré de liberté. Je dois choisir entre : zone de confort et détachement de mon égo. M’accrocher à un idéal destructeur – mais commode – ; ou bien renoncer.
Rappel : il n’y a aucun enjeu à réussir. D’autre part, si je rate l’examen, j’aurai prouvé par la pratique que ça n’a pas d’importance. J’ai toujours cru que la seule façon de se libérer, c’est d’agir, et plus précisément, de s’exercer (et de répéter les exercices jusqu’à les réussir). Rosa Luxemburg : « Celui qui ne bouge pas ne sent pas ses chaines. » Bouger. Parler ne sert à rien, il faut bouger. Ça ne sert à rien de se répéter qu’une feuille blanche n’a aucune importance. Cette vérité ne peut s’intégrer que par l’expérience : il faut expérimenter, rendre une feuille blanche et observer sans projeter. Je rends la feuille blanche. Le soleil continue de se lever, la nourriture n’a pas disparu de mon frigo, je me réveille toujours aux côtés de mon amoureux. Ce n’est que de cette sorte qu’on acquiert une forme de sagesse. La plupart des vérités existentielles sont expérimentales. Et il n’y a pas de petit progrès en la matière. Je m’en veux d’écrire (pour la deuxième fois) sur le stress des examens. Mais je m’en veux encore plus d’être aussi sévère à mon propre égard, comme si c’était de mon plein gré que j’ai fait des études une source énorme de souffrance. Humilité et douceur : assumer que l’on part de loin, assumer que ça peut prendre beaucoup de temps, ne pas se torturer à cause de ça.

What’s at stake? A spotless curriculum vitae? My future career only requires passing an exam (that has nothing to do with my current studies). So, what's the problem? Finding myself helpless in front of a blank sheet of paper. No one to give me a single ounce of recognition. You haven't written anything, so you don't know how to write, you haven't learned anything, so you don't deserve to study, you're stupid. The first thing people tell me to console me when I share this lack of confidence or self-esteem is that I'm mistaken in my judgment: "No, no, you're intelligent." Wrong answer. Tell me: "You're stupid, so what?" Reminder: the only order that counts is the axiological order, the moral order. A full brain and an empty heart are useless. I want my heart to take up all the space.
A blank sheet of paper. Yes, it's a piece of paper that's been giving me diarrhea for a week. A direct consequence of Epicurean wisdom: most of our problems are constructs of the mind (death, gods, etc.). The sheet of paper is just that: a sheet of paper. It's not proof that I'm useless. No matter what I do or don't do with this sheet of paper, it won't stop me from sleeping, eating, drinking, or loving. So, it's a false problem. My stomach hurts. I have one week left before the fateful exam—the only one I can't pass (without killing myself with work). And my body knows this well. I wonder what it takes for the body to follow the mind. Perhaps the body only embodies what the mind hides in the unconscious. And God knows how many unhealthy things I've taken into my body. So, what will I choose? It's a choice. I have a certain degree of freedom. I must choose between: comfort zone and detachment from my ego. Clinging to a destructive — but convenient— ideal; or giving up.
Reminder: there's no point in passing. On the other hand, if I fail the exam, I will have proven through practice that it doesn't matter. I've always believed that the only way to free yourself is to act, and more precisely, to practice (and repeat the exercises until you succeed). Rosa Luxemburg: "Those who do not move, do not notice their chains." Move. Talking is useless, you have to move. It is useless to repeat to yourself that a blank sheet of paper has no importance. This truth can only be assimilated through experience: you have to experiment, give up a blank sheet of paper, and observe what happens without projecting. I give up the blank sheet of paper. The sun continues to rise, the food has not disappeared from my fridge, I still wake up next to my lover. Only in this way can one acquire a form of wisdom. Most existential truths are experiential. And there is no small progress in this matter. I blame myself for writing (for the nth time) about exam stress. But I blame myself even more for being so harsh on myself, as if it were of my own free will that I made studying an enormous source of suffering. Humility and gentleness: accept that you are starting from a long way back, accept that it can take a long time, and don't torture yourself because of it.